À l’occasion de l’exposition Mondes multiples au Centre des Arts d’Enghien-Les-Bains, j’ai l’honneur de rendre hommage au travail précurseur de l’astrophysicien Jean-Pierre Luminet, qui réalisa en 1978 la première simulation informatique de l’Apparence lointaine d’un trou noir sphérique entouré d’un disque d’accrétion. La transposition stéréoscopique, sous la forme d’une tapisserie numérique au point d’Aubusson, souligne le caractère quasi-mythique de cette image paradoxale, le trou noir en lui-même étant par définition irreprésentable, horizon de la connaissance nous renvoyant au mystère des origines. Selon certaines théories, le trou noir pourrait constituer un passage entre des régions éloignées de l’univers, entre des univers distincts, voire être le lieu-même où se déploieraient ces univers. Par ailleurs, cette première mondiale, en tant que simulation informatique, aura pourtant été exécutée à la main, point par point, sur un négatif photographique, ce qui lui confère un caractère très particulier, évoquant plus volontiers les « noirs » d’Odilon Redon et la figure du Cyclope, que les modélisations en images de synthèse auxquelles nous sommes désormais habitués. J’espère que cette libre interprétation de la fameuse image de Jean-Pierre Luminet, en nous plongeant dans l’espace mental que révèle la stéréoscopie, saura proposer une expérience de la vision par « l’oeil de l’esprit » qui, chez le scientifique comme chez l’artiste, précède la mise en oeuvre du projet…
Jean-Pierre contemplant le trou noir
Flavien Théry | 2018
Tissage numérique au point d’Aubusson | Laine, coton, viscose | 172 x 86 cm. Interprétation stéréoscopique, d’après : « Apparence lointaine d’un trou noir sphérique entouré d’un disque d’accrétion », de Jean-Pierre Luminet, 1978.)