Dossier artistique

Spéculaire

Spéculaire réunit les artistes Flavien Théry et Fred Murie afin de développer des projets qui mettent à profit leur complémentarité, en associant des formes physiques, des phénomènes perceptifs et des technologies numériques. Leur ambition est de produire des images, sculptures, installations et dispositifs immersifs qui cherchent à manifester, au sein du réel, la présence d’autres dimensions, immatérielles, comme autant de nouvelles réalités insoupçonnées. Témoignant de ce souci d’un ancrage dans le réel, la référence à la science et le recours à des phénomènes physiques ouvrent cependant sur un champ des possibles qui peut évoquer un imaginaire proche de la science-fiction.

Si les artistes collaborent régulièrement depuis plus de dix ans, le projet : Le rayon extraordinaire, initié en 2020 et présenté aux Champs Libres de novembre 2022 à mars 2023, marque un tournant dans leur parcours. La résidence Art & Science dont ils ont bénéficié durant 2 ans à l’Université de Rennes 1 leur aura permis de développer une vingtaine d’œuvres en collaboration avec le chercheur Julien Fade, alliant une rigueur scientifique à une expression subjective. Le large public que l’exposition a su toucher témoigne de cet équilibre trouvé entre une démarche artistique exigeante et une proposition accessible au plus grand nombre.

Flavien Théry est diplômé de l’Ecole Supérieure des Arts Décoratifs de Strasbourg. Ses recherches s’inscrivent dans une filiation entre le mouvement de l’art optique – cinétique, et les pratiques contemporaines liées aux nouveaux médias, avec un intérêt particulier pour les relations entre art et science, dans leurs tentatives de percer le mystère de la lumière. Il est représenté en France et en Israël par la Galerie Charlot (Paris – Tel Aviv), en Allemagne par la DAM Gallery (Berlin).

Fred Murie a suivi un parcours scientifique avant d’affirmer une ambition artistique qui continue de se nourrir de cette formation initiale. Cette double identité l’a amené de la peinture vers des expérimentations numériques jusqu’à développer aujourd’hui une pratique par laquelle le langage devient forme. Qu’il soit visuel, verbal ou digital, le langage lui permet de déployer un imaginaire qui tend à faire exister l’invisible, à faire vivre le passé au présent.

Leurs œuvres ont intégré les collections de la New Media Arts Foundation – Hongkong / Zonhom international cultural development – Pékin, de La Beep Collection / New Art Foundation – Barcelone, du Fonds communal d’art contemporain de la Ville de Rennes, de Morlaix communauté, ainsi que diverses collections privées en France, en Allemagne et en Israël.

Flavien Théry

Flavien Théry est né à Paris en 1973. Diplômé de l’Ecole Supérieure des Arts Décoratifs de Strasbourg, il vit et travaille à Rennes.

Après un parcours dans l’univers du design, ses recherches s’inscrivent aujourd’hui dans une filiation entre le mouvement de l’art optique et cinétique, et les pratiques actuelles faisant appel aux nouveaux médias, avec un intérêt particulier pour les relations entre art et science.

Il entend, au travers de ses propositions plastiques, explorer l’ensemble du spectre de la lumière, visible et invisible, ondulatoire et corpusculaire, matérielle et spirituelle..

Flavien Théry est représenté en France et en Israël par la Galerie Charlot (Paris – Tel Aviv), en Allemagne par la DAM gallery (Berlin). Ses oeuvres sont également présentées sur artsy.

La lumière est ambivalente. Elle est considérée comme le symbole de l’évidence et de l’intuition, mais la question de sa nature a conduit à des révolutions scientifiques successives dans les derniers siècles. Tour à tour onde ou particule, elle serait finalement une combinaison des deux, incarnée par le photon. Cette troisième option continue de nous échapper, car nous ne sommes pas en mesure de la concevoir à partir de notre expérience du monde tangible. 

La physique quantique décrit le photon comme une onde de probabilité, où des états superposés coexistent. Sur la base de cette conception, certaines théories contemporaines rejoignent la notion de multivers, où de nouveaux univers sont constamment créés, correspondant aux alternatives qui ne sont pas réalisées dans le nôtre. Certaines interprétations de ces théories confèrent un rôle central à l’observateur. Comme si l’observation modifiait le phénomène observé.

La lumière reste un mystère. Elle est pourtant le vecteur de la plus grande partie de l’information que nous recevons du monde réel. Mais on peut aussi voir ce monde comme une création subjective. Flavien Théry envisage la lumière comme une réalité partagée entre un phénomène externe et notre propre conscience. La perception visuelle devient son médium. 

Certains de ses dispositifs artistiques mettent en jeu la question du point de vue, de sorte que l’observateur se confronte à la façon dont il est acteur de sa propre vision. De la même façon, certains projets présentent la lumière blanche comme la somme de nombreuses possibilités, qui se révèlent dans l’espace virtuel réfléchi par un miroir noir, les couleurs perçues dépendant à nouveau de la position de l’observateur. Nos capacités perceptives sont également éprouvées de manière temporelle, afin de voir comment les yeux et le cerveau créent le blanc, et l ‘ensemble des nuances colorées, à partir de simples flashs rouges, verts et bleus, espacés dans le temps.

Ainsi, Flavien Théry tente de donner forme aux questions et paradoxes qui découlent d’une tentative de penser la lumière.

Fred Murie

Fred Murie est né à Rennes en 1972. Il vit et travaille en Bretagne.

Suite à un parcours scientifique, Fred Murie a affirmé une ambition artistique qui continue de se nourrir de cette formation initiale. Cette double identité l’a amené de la peinture vers des expérimentations numériques jusqu’à développer aujourd’hui une pratique par laquelle le langage devient forme.

Qu’il soit visuel, verbal ou digital, le langage lui permet d’interroger le réel à travers un système de contraintes. La contrainte est ici envisagée comme un jeu de règles qu’il s’agit de subvertir et transcender afin d’en révéler la force créatrice. En s’émancipant des règles, il produit des formes hybrides et paradoxales comme autant d’énigmes visant à troubler nos sens.

Toute mémoire est une empreinte du réel inscrite dans un langage. Ces empreintes constituent la matière première de son travail et peuvent être de différentes natures : intimes dans le cas d’une écriture personnelle ou d’ateliers d’écriture liée aux souvenirs, culturelles lorsqu’il s’agit de textes ou d’œuvres majeures, scientifiques lorsqu’il s’agit de phénomènes physiques ou biologiques liés à la perception.

Mais le moteur de ses recherches réside dans la contrainte. C’est le plus souvent elle qui détermine la matière. Et c’est elle qui la déconstruit pour mieux la réinventer. La mémoire est traitée par des algorithmes comme une information et transformée suivant des codes définies par l’artiste. Les langages de programmation permettent de soumettre ces données numériques à des mécanismes de découpe, de mélange, de classement, d’accumulation qui donnent naissance à des formes aussi rationnelles qu’insolites. La manière dont il s’approprie les outils et les langages informatiques l’autorise à jouer avec l’ordre des choses afin de créer de nouvelles réalités.

Les formes virtuelles générées sont diffusées sur écran avant de s’incarner au travers d’installations, de projections et d’impressions bi ou tri dimensionnelles. Ces réalisations se révèlent tout à la fois séduisantes, de par leur aspect ludique et leur esthétique minimale, et déroutantes, de par leur nature monstrueuse engendrée par la machine. Leur manifestation dans l’espace d’exposition entend proposer des expériences sensorielles susceptibles de transformer notre perception du monde.

Si l’expression du souvenir, l’œuvre initiale ou la mesure physique est présente dans sa totalité, l’intégrité de son sens nous reste inaccessible. L’ambiguïté de cette présence insaisissable questionne notre rapport au réel par la mémoire. La mémoire ne s’efface pas ; elle nous échappe pour resurgir, parcellaire. Et chacune de ses émanations nous livre une vision du réel comparable à la pièce d’un puzzle que nous ne pourrons jamais reconstituer. Seul notre imaginaire porte l’espoir de faire exister l’invisible, de faire vivre le passé au présent.