Liseuse #1 s’attaque au Voyage au bout de la nuit en imprimant rigoureusement chaque page les unes au dessus des autres. Le style de Louis-Ferdinand Céline offre ainsi la matière à constituer un bloc à la fois sombre et aéré que la machine semble ici ne pouvoir achever.
Un ordinateur peut-il se nourrir de littérature ?
Les Liseuses tentent de répondre à cette question en posant un regard numérique sur des classiques de notre culture livresque.
Confronté à des textes majeurs, l’ordinateur engendre des sculptures constituées d’une matière typographique. Par sédimentation de caractères, de mots, de pages, des volumes naissent et s’inscrivent au travers d’applications web, d’impressions sur papier et bientôt, d’impressions 3D.
Chaque Liseuse est basée sur un algorithme qui permet à la machine d’accomplir les tâches qui lui sont assignées : traiter, analyser, classer et enfin générer un espace virtuel. Et c’est ce processus d’accumulation qui guide le choix de l’œuvre. En effet, le texte n’est pas sélectionné pour ses qualités littéraires mais pour sa structure, la couleur qu’il dégage et plus trivialement, sa disponibilité légale. Cette source irrigue le programme et incarne l’idée, tel l’acteur principal d’une fiction. Un roman s’imprimera dans un livre sans papier, une épopée se décomposera en autant de colonnes qu’elle contient de chapitres, un recueil de poèmes animera les touches d’un clavier, et cetera. Selon les points de vue, ces formes apparaîtront tantôt diaphanes, tantôt opaques, évoquant de fragiles architectures.
Ces volumes s’érigent donc en suivant des règles aussi rationnelles qu’absurdes. Si les textes sont restitués de manière exhaustive, ils se voient saturés par leur propre sens. Le recours à la perspective cavalière souligne ce sentiment de profondeur aplatie. La machine engendre ainsi des formes paradoxales : tout à la fois séduisantes, de par leur esthétique computationnelle, et inquiétantes, de par leur logique implacable.
Paradoxe qui interroge la place de nos humanités dans un monde absorbé par les machines et les algorithmes que nous créons.
Liseuse #1 | Voyage au bout de la nuit | Impression 60x40cm sur papier 200g
Liseuse #1-20 | Voyage au bout de la nuit | Impression 80x60cm sur papier 200g
Liseuse #1.118 | Voyage au bout de la nuit | Recueil 118 pages 21×14,8cm